BUSTE DE JEUNE FEMME ENVELOPPÉE DANS UNE ÉTOLE ET AUX ROSES DANS LES CHEVEUX, VERS 1863-1865

Auguste RODIN

Terre cuite originale à engobe rouge signée « A Rodin »
H. 39,6 x L . 26 x P. 22 cm
Circa 1863-1865
Provenance : Don d’Auguste Rodin à Charles Feil (1825-1887) ; Louise Feil, épouse de Charles Paisseau (1850-1919) ; docteur Georges Paisseau (1876-1948) ; Pierre-Henri Paisseau (1919-1998) ; par descendance.
Références bibliographiques : Micheline Hanotelle, Paris-Bruxelles : Autour de Rodin et Meunier, Courbevoie, 1997 ; June Ellen Hargrove, Gilles Grandjean, Carrier-Belleuse, le maître de Rodin, Compiègne, Palais de Compiègne, 22 mai-27 octobre 2014, RMN 2014.

Un avis d’insertion au Catalogue Critique de l’œuvre Sculpté d’Auguste Rodin, actuellement en préparation à la galerie Brame & Lorenceau, sous la direction de Jérôme Le Blay, rédigé en date du 9 février 2023, sous le n° 2022-6716B sera remis à l’acquéreur.

VENDU

Description

Tard dans sa vie, Rodin reconnut que Carrier-Belleuse (1824-1887) avait été : « le maître à qui je dois le plus […] Je lui dois le pouvoir de faire ce que je veux de mes mains ; c’est ainsi que l’on doit commencer. ». En effet, les années de collaboration entre les deux hommes, parfois tumultueuses, se sont avérées inestimables dans la carrière de Rodin. Ses bustes de fantaisie réalisés pendant ses années de jeunesse dérivent des conventions établies par son maître :  de séduisantes variations de belles créatures couronnées de vigne, de fleurs et de raisins dans la lignée des créations du XVIIIe siècle (de Houdon, en particulier). Même si l’influence de Carrier-Belleuse y est toujours présente, on peut aussi voir dans ses portraits que Rodin se détache progressivement de la grâce décorative pour laisser transparaître l’individualité du modèle. En ce sens, notre terre cuite possède une finesse psychologique bien différente des expressions stéréotypées des purs portraits de fantaisie. Le visage au beau modelé se détache nettement d’une étole. L’âme se cherche dans cette vivacité et dans les expressions changeantes du visage aux yeux profonds et au nez mutin. Cette saisie ne peut se produire que par la maîtrise des « profils », dont Rodin a maintes fois exposé sa théorie : « quand on tient le profil, on tient le portrait ». Le sculpteur a su ici aussi capter l’instant précis, et donner toute la vigueur nécessaire aux traits juvéniles de cette jeune fille.

D’après la correspondance conservée au Musée Rodin et les récits familiaux, Charles Feil (1825-1887), chimiste et industriel verrier installé rue Lebrun où Rodin loue un atelier entre fin 1863 et 1865, reçut ce buste du sculpteur en remerciements d’un soutien financier. L’œuvre est semble-t-il alors non signée et dans une lettre adressée à l’artiste par Charles Paisseau, gendre de Charles Feil le 27 avril 1900, celui-ci demande au sculpteur de bien vouloir signer la terre cuite (Archives MR-dossier Feil-Paisseau). L’œuvre étant probablement une ébauche réalisée pour Carrier-belleuse dont Rodin vient juste de rejoindre l’atelier, il semble logique que Rodin n’ait pas voulu la signer en 1865 pour éviter tout reproche de copie non autorisée. Il n’est de même pas étonnant que Rodin accepte d’apposer sa signature sur ce buste de jeunesse en 1900, ne craignant plus les foudres de Carrier-belleuse dont il a très largement surpassé la réputation. Le sujet est resté à notre connaissance inédit. C’est donc un témoignage capital des premiers pas de cet artiste majeur que celui-ci reconnait en 1900 en acceptant d’insculpter sa signature dans la terre cuite.