OURS TÊTE BAISSÉE

Georges-Lucien GUYOT

Bronze à patine brun noir, signé « Guyot ».
Fonte Susse du vivant de l’artiste. Porte le cachet « Susse frères Paris cire perdue » sur la terrasse et annoté « 2ème épreuve », porte un deuxième cachet du fondeur sous le bronze.
H.46 x L. 54 x P. 29 cm
Circa 1941

Provenance : Monaco, collection particulière.





Description

 

Figurant en bonne place dans son répertoire, l’ours est un des sujets favoris du sculpteur.

Lorsqu’en 1906, il expose ses premiers travaux au Salon des Artistes Français, notamment sa première pièce Ours dressé sur ses pattes arrière, Guyot raconte que son intérêt pour les plantigrades fut probablement inspiré par un incident que son grand père lui raconta :

« C’est peut-être d’un souvenir qu’un de mes grands-pères me conta à l’époque de mon adolescence que me vint ce besoin de reproduire en terre glaise les ours… D’une force peu commune, mon grand-père en sa jeunesse, accompagné de ses frères, releva le défi que lançait le patron d’une baraque de lutteurs à quiconque tomberait l’ours qu’il tenait caché derrière une tenture. L’enjeu était un louis d’or, dont il faisait miroiter le lumineux prestige au bout de ses gros doigts. Mon grand-père s’appelait Louis. Il était d’une belle vigueur et d’une prestance certaine… Et puis en ces années 1900… Vingt francs… Sitôt mis en présence de l’animal qui paraissait bien débonnaire, mon grand-père qui avait un peu pratiqué la lutte, fonça sur la bête et la ceintura. L’ours ne parut même pas s’en apercevoir et pensait sans doute au morceau de sucre qui suivrait le combat. Il se contenta de plaquer ses deux pattes de devant sur les épaules de son adversaire et fit sa pression… Cela dura deux minutes et inexorablement mon grand-père fut aplati au sol ». Le récit frappa tellement Guyot, qu’attiré par le monde animal, il fit du Jardin des Plantes son lieu favori, observant in-situ les deux fameuses fosses aux ours.

Impressionnant par sa puissance contenue, cet ours tête baissée doté d’une grande bosse au-dessus des épaules donnant la force aux membres antérieurs, pointe son museau sur le sol prêt à retourner la terre et les roches. Guyot a su faire ici preuve d’un grand sens de l’observation afin de retranscrire en bronze l’instinct spécifique du plantigrade. A mi-chemin entre les surfaces lisses de François Pompon et celles accidentées de Rembrandt Bugatti, l’émotion provoquée par cette sculpture tient dans la force et l’élégance évocatrice des lignes, le respect des proportions naturelles et la tendresse jamais démentie d’un amoureux de la faune sauvage. Annoté « 2ème épreuve » par Susse, notre bronze est de fait une fonte spéciale d’une qualité remarquable, d’un noir profond qui donne une densité particulière au volume de l’animal saisi dans un instant précis de sa vie quotidienne.