ÉLÉPHANT, PROMENADE EN PALANQUIN

Christophe FRATIN

Bronze à patine brun vert, estampillé « FRATIN ».
H.59 x L. 50,5 x P. 17 cm
Circa 1850
Très rare épreuve.

Bibliographie : Pierre Kjellberg, Les bronzes du XIXe siècle, Dictionnaire des sculpteurs, Paris, 1987, pp. 322 à 327 ; Michel Poletti et Alain Richarme  « Fratin. Objets décoratifs & Sculptures romantiques », cat. exp. Paris, Univers du Bronze, 2000 ; Collectif, « Maharaja The Splendor of India’s Royal Court », cat. Exp. Londres, Victoria and Albert Museum, 2009.
Ventes : Catalogue de tous les modèles en bronze publiés et inédits de M. Fratin sculpteur, par Me Bonnefons de Lavialle , Paris 16-18 avril 1850, modèle référencé sous le n° 200. 

 

Description

Fils d’un taxidermiste, Christophe Fratin évolue dès son enfance au milieu d’un univers peuplé d’animaux qui nourrissent ensuite sa sculpture tout au long de sa carrière. Doté d’une imagination fertile, sa richesse d’inspiration est impressionnante, comme en témoigne le bestiaire que compose ses sculptures. Les sujets qui rencontrent le plus de succès sont les ours anthropomorphes, les singes, les fauves, les cervidés, les sangliers …  et surtout les chevaux, ses animaux de prédilection. Suivent les éléphants, que le sculpteur nous propose seuls, d’Afrique ou d’Asie ; ils sont accompagnés par les rhinocéros qu’il a été un des premiers à représenter. A titre d’exemple, le catalogue de sa vente de 1850 (voir opus-cité supra) mentionne plusieurs sujets d’éléphants : Éléphant femelle d’Afrique, défendant son petit contre un lion (199) ; Grand groupe, éléphant, chasse aux tigres (201); Éléphant et Chinois (202) ; Éléphant tuant un tigre (203) ; Éléphant d’Asie (204) et sous le n° 200 notre modèle Éléphant, promenade en palanquin. C’est certainement à la ménagerie du Jardin des plantes que Fratin a étudié la morphologie de ces pachydermes, Castor et Pollux étant à cette époque un couple d’éléphants d’Asie très populaires. Mais pour réaliser ce modèle ambitieux, raffiné et exotique, on peut imaginer que Fratin, s’étant rendu en Angleterre entre 1833 et 1834, a été influencé par les diverses représentations de la magnificience de l’Inde dans un pays alors au faîte de sa conquête coloniale. Comme nous l’indique l’exposition du Victoria and Albert museum (opus-cité supra), c’est à cette époque qu’apparaît, dans la culture anglaise,  le « maharaja » et les arts de sa cour. Cet engouement pour l’Inde s’est véritablement confirmé lors de l’Exposition universelle de 1851. Au Crystal Palace, l’une des sections les plus larges et les plus remarquées de l’exposition montrait des produits de l’Inde, dont la plupart avaient été gracieusement offerts par le Nawab Nazim du Bengale : un trône dont le dais en soie bleue surmontait quatre piliers d’argent et dont le siège, recouvert de velours pourpre, était bordé d’or et d’argent. Deux palanquins, dont l’un d’ivoire et d’or, portés par six porteurs, un howdah (couverture pour éléphant), une tente spectaculairement meublée de tapis et de coussins, de riches soieries et cotonnades, des châles, des éventails, des minerais, des médicaments, des teintures, du caoutchouc, des meubles luxueux, des pierres précieuses, de la joaillerie, des céramiques, des instruments agricoles, de la maroquinerie, de la nourriture et des spécimens de bateaux traditionnels… Fratin très prisé par la clientèle anglaise, y expose et passe alors pour le plus grand sculpteur animalier du moment (Groupe d’aigles en bronze, n° 1235).

Cette sculpture atypique du sculpteur, peut être considérée à juste titre comme l’un de ses chefs d’œuvre. Elle rivalise de fait avec les sculptures orientalistes de l’époque romantique et nous donne à rêver des fastes de l’Inde des rois : ceux qui avaient l’honneur de siéger dans ces palanquins étaient les maharajas, chefs religieux, militaires et politiques, mais aussi protecteurs et mécènes des arts.